Mélanome: qu’est-ce que c’est ?
Les mélanomes constituent des tumeurs malignes développées aux dépens des cellules pigmentaires (mélanocytes) présentes essentiellement à la base de l’épiderme, des muqueuses, des méninges et de l’œil.
Le mélanome est le cancer de la peau dont on a le plus parlé ces dernières années. Beaucoup d’idées reçues existent à son sujet, en particulier dans ses rapports avec les grains de beauté. Sa fréquence augmente de façon inquiétante. C’est le cancer de la peau le plus grave. Si son diagnostic n’est pas suffisamment précoce, des métastases risquent d’apparaître.
Le mélanome, s’il est moins courant que les autres cancers de la peau (carcinomes basocellulaires et spinocellulaires), a vu sa fréquence augmenter de façon préoccupante ces dernières années. Il peut se rencontrer à tout âge mais reste très rare chez l’enfant. Il concerne davantage les patients roux et blonds aux yeux clairs. Sa fréquence augmente avec les expositions solaires et les coups de soleil, attrapés notamment dans l’enfance (il existe des formes familiales plus rares). Une peau présentant de très nombreux grains de beauté est aussi une peau à risque.
Du mélanome aux métastases
Le mélanome à extension superficielle en constitue la forme la plus fréquente. Il se présente comme une tache noire, au contour irrégulier, encoché, avec des fuites de pigment, aux couleurs non homogènes, polychromes (noir, rouge, brun). Il peut siéger à n’importe quel endroit du corps, volontiers dans le dos et sur les jambes. Cette tache va s’étendre progressivement en surface. La prolifération de cellules cancéreuses mélaniques n’est alors localisée qu’à l’épiderme.
Après un temps variable d’extension superficielle, la lésion devient plus épaisse, franchement tumorale ; elle peut s’ulcérer et cet aspect correspond à l’envahissement du derme, d’abord superficiel puis profond. Les métastases apparaissent ensuite, d’abord dans les ganglions en rapport avec le territoire de peau intéressé, puis dans n’importe quel organe : foie, cerveau, os, poumon…
Quand ce mélanome à extension superficielle se développe à partir d’un grain de beauté (naevus), ce dernier change alors de forme et de couleur, puis s’étend rapidement. Moins fréquent mais plus difficile à diagnostiquer de façon précoce, le mélanome nodulaire d’emblée se présente sous la forme d’une tumeur noire en relief dès l’origine.
Le mélanome acral se développe au niveau des extrémités. Il peut se présenter plus rarement sous une forme bourgeonnante, rouge, pratiquement sans pigment (mélanome achromatique). Il est plus fréquent chez les sujets à peau noire.
Forme particulière chez les patients âgés, le mélanome de Dubreuilh prend l’aspect d’une vaste tache noire, irrégulière du visage, d’évolution assez lente avant de donner lieu à une infiltration tumorale plus profonde.
Ne pas hésiter à consulter
Le diagnostic précoce de mélanome est important car lorsque la prolifération mélanique n’a pas encore atteint le derme, l’ablation de cette lésion peut permettre d’apporter une guérison totale. Il faut donc consulter rapidement à l’apparition d’une tache noire extensive.
Quand on est porteur de nombreux grains de beauté et que beaucoup d’entre eux ont un aspect en tache noire irrégulière, il est prudent de les faire examiner par un dermatologue.
Quand un naevus subit un accroissement rapide, il faut aussi le faire examiner. Par contre, le traumatisme ou le frottement sur un grain de beauté banal en relief, ne constitue pas contrairement aux idées reçues, un danger.
Dans l’immense majorité des cas, l’œil d’un praticien entraîné permet un diagnostic. Celui-ci peut s’aider d’un examen de la peau (dermatoscopie) et, au moindre doute, doit pratiquer l’ablation de la lésion suspecte avec un examen anatomopathologique.
Mélanome: comment cela marche-t-il ?
Le mélanome est un cancer touchant les cellules pigmentaires (mélanocytes) essentiellement présentes dans la peau mais aussi les muqueuses, les méninges et l’œil.
La cancérisation des cellules mélanocytaires provoque une prolifération d’abord visible seulement dans l’épiderme, puis dans le derme superficiel. Les cellules vont se multiplier ensuite pour atteindre la profondeur du derme et pouvoir migrer dans les lymphocyteslymphocytes – il s’agit alors de métastases ganglionnaires – et dans les vaisseaux sanguins – métastases viscérales (foie, cerveau, os…) –
L’aspect d’un mélanome au microscope rend compte de la malignité importante de cette tumeur : une cellule mélanique (mélanocyte) cancéreuse apparaît, au microscope, très différente de la cellule normale. Sa forme d’abord prend des aspects variés au sein de la même tumeur. Le noyau des cellules se déforme, devient plus foncé (hyperchromatique), parfois monstrueux. Les signes de multiplication des cellules sont visibles : on les appelle mitoses. On retrouve, au sein de la tumeur, de la mélanine qui s’accumule de façon non homogène.
La disposition des cellules malignes se fait sans architecture régulière, en amas ou au contraire en petit nid disséminé.
Le derme environnant réagit à la présence des cellules cancéreuses par une inflammation plus ou moins importante, identifiable par une augmentation de la taille des vaisseaux sanguins cutanés, autour de la tumeur, par l’apparition de nouveaux petits capillaires, par la présence de cellules jouant un rôle dans l’immunité : les lymphocytes.
Une atteinte de plus en plus profonde
- Dans un premier temps, l’atteinte maligne ne se fait que dans l’épiderme ; c’est la phase où le mélanome peut guérir complètement si on l’enlève. Après cette phase d’extension en surface, les cellules malignes vont pénétrer dans le derme, d’abord en superficie puis de plus en plus profondément jusqu’à l’hypoderme (tissu graisseux sous-cutané). Plus la tumeur est profonde par rapport aux couches de la peau, plus le risque d’évolution vers des métastases est important. C’est l’indice de Clark :
- niveau I : atteinte de l’épiderme ;
- niveau II et niveau III : atteinte du derme superficiel ;
- niveau IV : atteinte du derme profond ;
- niveau V : atteinte de l’hypoderme.
La mesure de la tumeur au microscope, appelée indice de Breslow, donne une idée plus juste de la gravité du mélanome. C’est la mesure de cet indice qui sert de référence à l’importance de la reprise chirurgicale après la première ablation de la tumeur (cf. traitement)
On considère qu’au-dessous de 0,75 mm d’épaisseur, les chances de guérison sont très bonnes. Au-dessus de 3 mm, le pronostic devient beaucoup plus mauvais. Ces éléments n’ont cependant qu’une valeur statistique. On peut guérir d’un mélanome épais ou au contraire avoir des métastases avec un mélanome de faible épaisseur.
Des symptômes particuliers
Quand les cellules cancéreuses atteignent les ganglions, elles se déplacent dans les vaisseaux lymphatiques et vont s’arrêter au premier territoire ganglionnaire en rapport avec la tumeur initiale : plis inguinaux pour la jambe par exemple. C’est pour cela que la palpation régulière des ganglions fait partie de la surveillance par le praticien.
Quand les cellules cancéreuses pénètrent dans les vaisseaux sanguins, elles peuvent alors se disséminer dans d’autres organes comme le cerveau, le foie, les os et elles s’y développent. Ce sont les métastases viscérales responsables de symptômes particuliers à chaque organe.
La recherche sur les mélanomes se fait aujourd’hui dans le domaine immunologique. Il est important de comprendre pourquoi les mélanocytes échappent brutalement au contrôle complexe de l’immunité. On pourra sans doute dans l’avenir imaginer de favoriser les défenses de l’organisme contre ces cellules cancéreuses (immunothérapie, vaccin). Pour l’instant, ces méthodes appartiennent au domaine de la recherche, nécessitant des protocoles d’essai complexes réservés à certains centres de recherche cliniques.
Mélanome: quels risques ?
Le mélanome a plus de chance d’apparaître en fonction de la couleur de la peau, de l’exposition au soleil (mode de vie), des antécédents familiaux et du nombre de naevi pigmentaires présents sur la peau.
La fréquence du mélanome augmente dans les pays ainsi que sa gravité comme en témoigne un taux de mortalité croissant. Exemple spectaculaire : l’Australie où le teint clair des habitants d’origine anglo-saxonne, associé à un ensoleillement important et à des habitudes de vie en plein air, a entraîné une multiplication très inquiétante de cette pathologie.
Le teint roux ou blond aux yeux clairs se caractérise par une faible protection de la peau par la mélanine. Les rayons ultraviolets du soleil, UVB mais aussi UVA, pénètrent dans la peau plus facilement. Les peaux noires font des mélanomes de façon exceptionnelle (mis à part le mélanome acral, cf. définition).
Il est important d’être informé de ce risque afin d’être vigilant, de bien se protéger et protéger ses enfants. Les coups de soleil attrapés dans l’enfance ont aussi été mis en cause dans la survenue d’un mélanome. L’exposition solaire est un facteur de risque important même s’il existe aussi des mélanomes dans les régions non exposées (pieds, sous les ongles etc.), ce qui fait dire que l’exposition solaire n’est pas le seul facteur en cause. L’exposition solaire, ce n’est pas seulement aller à la plage se faire bronzer, c’est aussi pratiquer une activité sportive au soleil ou exercer un métier en plein air (marin, agriculteur, ouvrier du bâtiment etc….). L’abus de solarium est évidemment aussi un facteur de risque.
Des familles à risque
Le nombre de naevi, ou grains de beauté. Certains individus ont de très nombreux grains de beauté disséminés sur l’ensemble de la peau. Cela représente un risque accru de mélanome.
La présence de grains de beauté dès la naissance. Un grain de beauté est rarement congénital. La plupart des grains de beauté apparaissent dans l’enfance et l’adolescence. Un grain de beauté de grande taille (plusieurs centimètres), visible dès le premier jour de la vie est un naevus « à risque » de dégénérescence en mélanome. Quand celle-ci a lieu, cela peut se produire le plus souvent à l’âge adulte.
Les facteurs génétiques sont aussi à prendre en compte. Il existe des familles où l’on retrouve des cas de mélanomes et le risque est alors accru pour chacun de ses membres. Il existe aussi des formes familiales rares de mélanomes où tous les membres de la famille sont porteurs de très nombreux grains de beauté « à risque ».
Mélanome: comment vivre avec ?
Il s’agit ici plus particulièrement de prévenir l’apparition du mélanome en diminuant les facteurs de risque.
La vie moderne en plein air, les loisirs, le sport ont multiplié ces dernières années le risque lié à l’exposition solaire. La meilleure connaissance des aspects cliniques débutants du mélanome permet d’espérer une diminution du nombre de mélanomes évolués en pratiquant une ablation précoce. C’est tout l’intérêt du dépistage chez les patients à risque.
Un individu au teint clair ne bronze pas et ne doit pas s’acharner à bronzer, sinon il brûle. La fréquentation des solariums lui est donc interdite.
L’exposition solaire ne se résume pas à s’allonger sur la plage et à se faire rôtir au soleil. On est aussi exposé en mouvement qu’au repos. L’exposition solaire c’est donc la marche, le vélo au soleil, l’exercice de sa profession à l’extérieur (marin, agriculteur, bâtiment). Dans une voiture, à travers une vitre, on reçoit aussi des UVA, ce qui peut s’avérer à la longue assez dangereux. L’exposition solaire brutale (coup de soleil) joue un rôle néfaste dans l’apparition des mélanomes et on pensera à protéger les enfants. Il faut rappeler que la peau « accumule » tout au long de la vie les radiations ultraviolettes reçues ; les dégâts se font donc à long terme.
Une indispensable surveillance
La meilleure protection reste les vêtements. On évitera l’exposition à des heures où le taux d’UV est important (12 heures – 16 heures). La crème solaire à indice fort, si elle reste un bon moyen d’éviter les coups de soleil, n’a pas apporté toute la satisfaction attendue pour diminuer la fréquence des mélanomes. Le fait de mettre de la crème solaire peut donner l’impression d’une fausse sécurité et donc conduire à s’exposer davantage.
L’habitude doit être prise de faire examiner chez un praticien entraîné (dermatologue) une tache noire d’apparition suspecte. Cet examen systématique et la surveillance de la peau chez des patients à risque, aux grains de beauté très nombreux sont utiles. L’examen par le patient lui-même (auto surveillance) de ses naevi est utile et doit l’amener, en cas de doute, à consulter. La surveillance et souvent l’ablation des naevi à risque (naevi congénitaux) sont aussi des mesures efficaces de prévention secondaire. Il n’est cependant pas utile de s’inquiéter de tous les petits grains de beauté très banals, en relief, très fréquents. Rappelons qu’un mélanome apparaît dans la majorité des cas en peau saine sans grain de beauté préexistant et que la prévention ne consiste en aucun cas à enlever tous les grains de beauté qui se présentent.
Mélanome: quel traitement ?
Le traitement d’un mélanome dépend du stade de diagnostic. Il n’existe pas au sein de métastases multiples de chimiothérapie radicale. Il existe des traitements adjuvants en cours d’évaluation.
Le traitement chirurgical est le traitement de base d’un mélanome. Dans les mélanomes se révélant épais après l’analyse anatomopathologique, un traitement adjuvant peut être proposé. L’importance de la taille de l’ablation chirurgicale est fonction de l’épaisseur du mélanome au microscope. Le traitement des formes avec métastases (ganglions, métastases viscérales) est à discuter selon chaque cas.
Traitement des mélanomes de stade I
Rappel :
- stade I : mélanome primitif localisé ;
- stade II : métastases ganglionnaires régionales ;
- stade III : métastases à distance.
Dans un premier temps, le praticien va ôter, sous anesthésie locale, la lésion suspecte. L’analyse au microscope va confirmer le diagnostic et le mélanome sera classé selon son épaisseur, mesurée sur la coupe (Breslow) et selon la profondeur d’atteinte de la couche de la peau par les cellules malignes (Clark). Selon l’épaisseur, une ablation complémentaire sera discutée. Pour les mélanomes uniquement localisés à l’épiderme, une ablation simple à 0,5 cm des bords suffit. Pour les mélanomes ayant franchi la couche basale de l’épiderme, s’ils sont inférieurs à 1 mm, on pratique une ablation à 1 cm des bords ; de 1 mm à 2 mm : ablation à 2 cm ; supérieurs à 2 mm : ablation à 3 cm. Selon la localisation, les ablations larges peuvent être plus ou moins difficiles et nécessitent des techniques chirurgicales (greffe, lambeau) pour réparer la perte de substance. Pour un mélanome acral, il faudra peut-être envisager une amputation de la phalange et, si la lésion est étendue, l’amputation d’un doigt ou d’un orteil.
La surveillance après traitement chirurgical des mélanomes de stade I se fait à vie
L’examen clinique régulier du malade est suffisant (peau, ganglion). Le but est de dépister des métastases ganglionnaires et l’apparition d’un 2e mélanome. Le rythme et la surveillance ne sont pas standardisés : tous les trois mois, puis tous les six mois, puis tous les ans et ceci à vie. Le temps de ces différentes phases est variable selon l’épaisseur de la lésion.
Traitement des mélanomes avec métastases ganglionnaires (extension régionale)
Traitement :
La présence de ganglions palpables au niveau régional nécessite un curage chirurgical de tous les ganglions de la région atteinte. Ces ganglions seront analysés. Les autres traitements (radiothérapie et chimiothérapie) ne sont pas utilisés à ce stade. Seul un traitement adjuvant par Interféron peut être proposé.
Bilan :
Recherche d’autres métastases à distance (scanner corps entier), surveillance.
Traitement des mélanomes avec métastases
Traitement :
C’est dans cette catégorie la plus évoluée que les traitements par radiothérapie, chimiothérapie, peuvent retrouver une place pour tenter de réduire le nombre ou le volume des métastases. La chirurgie peut être utilisée pour traiter une métastase unique quand elle est accessible. Les médicaments utilisés par la chimiothérapie sont peu nombreux par rapport à d’autres cancers et leur action sur les cellules cancéreuses mélanocytaires reste faible. On peut citer la dacarbazine, le cisplatine, la fotémustine. Bien sûr, de nombreux protocoles sont à l’étude pour essayer d’avancer dans l’efficacité du traitement des métastases de mélanomes. L’immunothérapie reste aussi une thérapeutique expérimentale (Interféron, Interleukine). De toute façon, la multiplicité des organes atteints et des cas particuliers rend aujourd’hui difficile un schéma thérapeutique standard dans le traitement des mélanomes métastatiques. Le pronostic vital est en jeu dans cette forme grave évoluée de mélanomes.
Bilan :
Scanner.
Traitement adjuvant
Aucun traitement chimiothérapique ni hormonal n’a montré d’effet sur la survie des patients porteurs de mélanome. L’Interféron alpha, selon différents protocoles (Kirkwood, Grob) peut être proposé dans des mélanomes épais, supérieurs à 1,5 mm ou avec des métastases ganglionnaires. Il a montré une amélioration faible mais significative de la survie.