Micronutriments indispensables à l’organisme, les vitamines jouent un rôle qui fut longtemps ignoré: les médecins observaient les manifestations cliniques de maladies par carence, comme le béribéri ou le scorbut, sans en connaître l’origine. De nos jours, une quinzaine de vitamines sont identifiées selon des critères précis (structure, rôle, sources et apports recommandés). Les enjeux de la vitaminologie et de la vitaminothérapie concernent notre nutrition, qui ne fournit pas toujours les quantités de vitamines nécessaires à un état de santé optimal, et l’utilisation de ces dernières comme substances curatives.
Apport nécessaire en vitamines
La plupart des vitamines se distinguent par des structures chimiques très différentes. Ce sont des substances organiques, n’apportant pas d’énergie mais indispensables, en quantités infimes, à l’organisme, incapable de les synthétiser. La majorité d’entre elles jouent le rôle de cofacteurs, régulant de très nombreuses réactions métaboliques.
Les apports alimentaires sont suffisants lorsqu’ils assurent à l’organisme la pleine satisfaction des besoins. Lorsque l’apport vitaminique est inférieur aux besoins, aucun signe de carence n’est visible pendant les premières semaines; mais les réserves étant entamées, les fonctions biologiques concernées commencent à être perturbées: on parle alors de déficience. Si la situation se détériore encore, elle aboutit à une carence, et des signes cliniques apparaissent. Toutefois, le phénomène est réversible: administrée en quantités adéquates, la vitamine manquante rétablit l’équilibre.
À l’inverse, des apports anormalement élevés, le plus souvent dus à la prise excessive et prolongée de préparations pharmaceutiques dépassant les doses physiologiques, provoquent des hypervitaminoses, génératrices de troubles métaboliques. En effet, si la plupart des vitamines hydrosolubles sont éliminées par les reins, les vitamines liposolubles sont stockées.
Classification des vitamines
L’établissement de la nomenclature des vitamines a d’abord suivi l’ordre alphabétique, puis les vitamines hydrosolubles ont été regroupées sous la lettre B – elles sont en général distinguées par un numéro, de B1 à B12 –, et, parmi les liposolubles, celles qui ont été identifiées après les vitamines A et D sont désignées par les lettres E et K.
Les vitamines liposolubles
Elles ont en commun certaines propriétés: solubilité dans les lipides, absorption digestive liée à celles des lipides alimentaires, stockage dans l’organisme, en particulier dans le foie.
Vitamine A
Il en existe deux formes chimiques proches d’origine animale (beurre, foie de poisson): A1 et A2, la première étant deux fois plus active que la seconde. Des végétaux (choux, carotte…) fournissent un précurseur de la vitamine A1, le ß-carotène, activé par une enzyme digestive. Chez tous les vertébrés, la vision nocturne normale, le renouvellement des épithéliums, la croissance et l’élaboration des hormones sexuelles dépendent de l’apport journalier de vitamine A. Pour l’homme adulte, la dose conseillée est de 2,5 mg/j environ; une carence aboutit principalement à une xérophtalmie (sécheresse des muqueuses de l’œil) associée à une héméralopie, et, chez les jeunes, à des troubles de croissance. Une hypervitaminose, caractérisée par une coloration jaune de la peau, est en général bénigne et réversible.
Vitamine D
Elle provient de deux sources: l’une, exogène, est l’alimentation (huile de foie de poisson, œufs…); l’autre, endogène, est une synthèse effectuée par les cellules de l’épiderme sous l’influence des rayons solaires ultraviolets. Cette vitamine intervient dans la régulation du métabolisme phosphocalcique en favorisant l’absorption intestinale du phosphore et du calcium ainsi que leur renouvellement sur la trame osseuse. Les apports recommandés sont de 10 à 20 Yg par 24 heures. Une avitaminose D, souvent due à une exposition insuffisante au soleil, est à l’origine du rachitisme de l’enfant (déformations squelettiques) et de l’ostéomalacie de l’adulte (douleurs osseuses). Une hypervitaminose D, consécutive à des traitements intenses par exemple, se traduit par des vomissements et une déshydratation.
Vitamine E
Les composés doués d’activité vitaminique E se trouvent essentiellement dans les germes de blé et dans les parties vertes des végétaux. Le rôle de ces molécules est mal connu, mais la plus active, l’N-tocophérol, se comporte comme un antioxydant. Les besoins journaliers sont de 15 à 20 mg, et ni la carence ni l’hypervitaminose n’ont été observées chez l’homme.
Vitamine K
Les différentes vitamines K sont présentes dans les légumes verts et les farines de poisson. L’apport exogène n’est pas indispensable, car la flore intestinale de l’homme est capable de la synthétiser. Elle participe à la fabrication, par le foie, de différents facteurs de la coagulation sanguine, essentiellement la prothrombine. Chez un adulte, les besoins sont de 2 mg/j environ; si une carence d’absorption intestinale intervient, elle entraîne des saignements, voire des hémorragies.
Les vitamines hydrosolubles
Le «complexe vitaminique B» regroupe une dizaine de vitamines solubles, dans l’eau et dans les liquides physiologiques où elles circulent. Cette propriété empêche leur stockage dans l’organisme: l’excédent apporté par l’alimentation est éliminé dans les urines. La plupart de ces vitamines sont peu résistantes à la chaleur, à l’air et aux rayons ultraviolets.
Vitamine B1, ou thiamine
Fournie en grandes quantités par la levure, les germes de blé et les légumineuses, elle remplit une fonction importante dans le catabolisme des glucides, producteur d’énergie. L’apport recommandé est de 1,5 mg/j en moyenne. L’avitaminose B1 peut résulter d’une malnutrition chronique, d’un défaut d’absorption intestinale (diarrhées) ou d’une consommation excessive d’alcool; le béribéri se traduit par des troubles nerveux et cardio-vasculaires.
Vitamine B2, ou riboflavine
Ce composé, qui se trouve dans les végétaux, surtout la levure de bière, mais aussi dans les abats, le lait et les œufs, favorise le métabolisme des glucides, des lipides et des protides. Il agit comme détoxifiant et dans le métabolisme du fer. Les besoins sont d’environ 2 mg/j. L’alimentation fournissant habituellement des quantités suffisantes de vitamine B2, la carence est très rare chez l’homme: seul un défaut d’absorption est responsable d’une irritation oculaire, par exemple.
Vitamine PP, ou nicotinamide
L’organisme la puise directement dans les aliments, comme pour les autres vitamines B, ou la synthétise à partir d’un acide aminé, le tryptophane. Le cofacteur nicotinamide intervient dans les processus d’oxydoréduction cellulaires. Les besoins journaliers d’un adulte sont de 20 mg environ, et la carence en vitamine PP (initiales signifiant «préventive de la pellagre») provoque des formes plus ou moins graves de la pellagre, caractérisée, à un stade avancé, par une dermatite, des diarrhées et des troubles mentaux (démence).
Vitamine B5, ou acide pantothénique
Présent dans la plupart des tissus animaux et végétaux, l’acide pantothénique entre dans la composition de la coenzyme A indispensable au métabolisme des lipides, glucides et protides, ainsi qu’à la régénération des épithéliums. Les besoins sont évalués à entre 5 et 10 mg par 24 heures; l’avitaminose B5 n’existe pas.
Vitamine B6, ou pyridoxine
Elle provient des mêmes sources que les autres vitamines B, et entre en jeu surtout dans le métabolisme des protides. Ses apports doivent être proportionnels à ceux des protéines, soit, en moyenne, 2 mg par 24 heures. Chez l’adulte, les symptômes de carence sont des troubles neurologiques, digestifs et cutanés.
Vitamine B8, ou biotine
Fournie par l’alimentation (abats, jaune d’œuf) et synthétisée par la flore bactérienne, la biotine est une coenzyme spécialisée dans le transport des radicaux CO2 au cours du métabolisme des glucides et des lipides. Les besoins quotidiens, de l’ordre de 150 à 300 Yg, sont couverts par une alimentation équilibrée. Aucune carence ne touche l’homme.
Vitamine B9, ou acide folique
Indispensable à la maturation des globules rouges et au métabolisme de certains acides aminés, elle se trouve surtout dans les feuilles et dans la levure de bière. Les besoins d’un adulte sont de 300 Yg/j. Dans les pays industrialisés, les carences se manifestent chez la femme enceinte et le nourrisson par une anémie macrocytaire.
Vitamine B12, ou cyanocobalamine
Très abondante dans les tissus animaux, surtout le foie, elle apparaît, chez les végétaux, uniquement dans les algues et le soja fermenté. Son absorption nécessite la présence d’une glycoprotéine (appelée facteur intrinsèque) fabriquée par l’estomac, et son action concerne les hématies en formation. Les besoins sont très faibles (de 2 à 3 Yg/j). La carence d’apport est très rare, mais l’absence du facteur intrinsèque peut être responsable d’une anémie de Biermer: l’utilisation de la vitamine – appelée facteur extrinsèque – étant empêchée, le nombre de globules rouges diminue.
Vitamine C, ou acide ascorbique.
Bien que n’appartenant pas au groupe B, la vitamine C présente toutes les caractéristiques d’une vitamine hydrosoluble. On la trouve dans les fruits et les légumes frais. Ses rôles sont multiples: elle intervient, entre autres, dans l’élaboration du tissu conjonctif; elle stimule la formation de glycogène, l’absorption de fer… Les besoins sont de l’ordre de 75 mg/j, et davantage en cas d’infection. Chez l’adulte, l’avitaminose C est à l’origine du scorbut, entraînant fatigue, œdèmes des membres et hémorragies des gencives.