Bronchite chronique et bronchite chronique obstructive : Définition
C’est une affection caractérisée par une toux grasse avec expectorations (crachats) chroniques, permanentes ou récidivantes, survenant au moins trois mois par an, pendant au moins deux années consécutives.
La bronchite chronique est une maladie fréquente. En France, on estime qu’il existe trois millions de bronchiteux chroniques, 300 000 bronchiteux chroniques obstructifs, 20 000 en insuffisance respiratoire chronique traités par oxygénothérapie ou ventilation assistée. Elle est la cause de 10 000 décès par an. C’est la deuxième cause d’invalidité avec un coût de la maladie de quatre milliards de francs par an. La cause principale en est le tabagisme.
La bronchite chronique touche cinq hommes pour une femme en raison des habitudes tabagiques. Elle touche un homme sur cinq de plus de 40 ans et dans 10 à 20 % des cas elle évoluera vers une bronchite chronique obstructive. Elle se définit comme une toux et expectoration trois mois dans l’année et deux années consécutives en dehors de toute pathologie broncho-pulmonaire ou cardiaque caractérisée. Il faudra éliminer les autres causes de toux et d’expectoration chronique, asthme, dilatation des bronches (augmentation permanente du calibre des bronches), un cancer pulmonaire.
Les quatre stades de la bronchite
• Bronchite chronique simple avec sécrétions claires.
• Bronchite chronique suppurée avec sécrétions purulentes.
• Bronchite chronique obstructive avec un essoufflement et une obstruction bronchique aux explorations fonctionnelles respiratoires.
• Insuffisance respiratoire obstructive avec un essoufflement majeur et une atteinte de l’oxygénation (baisse de la teneur en oxygène du sang artériel avec ou sans augmentation de la teneur en gaz carbonique). Le poumon ne remplit plus sa fonction d’oxygénation de l’organisme et d’évacuation du gaz carbonique.
Bronchite chronique : Symptômes
La symptomatologie se résume à une toux grasse avec expectoration. Un essoufflement apparaît dans les formes évoluées.
La toux est généralement matinale, aggravée par la position couchée. Elle peut être très discrète et souvent banalisée (toilette bronchique matinale chez un fumeur).
L’expectoration est le plus souvent transparente et blanchâtre. Les cas d’infections jaunâtres voire verdâtres, sont d’abondances variables mais rarement très abondantes.
L’essoufflement traduit une bronchite chronique obstructive le plus souvent. Elle est variable selon les malades et n’est pas liée à l’atteinte de la fonction respiratoire mesurée par les explorations fonctionnelles respiratoires. Elle survient au début pour des efforts importants, puis pour des efforts de plus en plus minimes et finalement au repos.
Deux grandes catégories de symptômes
Le tousseur cracheur avec atteinte rapide de l’oxygénation (mesurée grâce aux gaz du sang), et l’emphysémateux chez qui prédomine la dyspnée d’effort avec atteinte tardive sur l’oxygénation.
Bronchite chronique : Diagnostic
L’exploration fonctionnelle respiratoire avec ou sans mesure des gaz du sang, est l’examen clé du diagnostic.
Les explorations fonctionnelles respiratoires (EFR) mesurent de façon objective la fonction respiratoire. Cet examen est indolore. Il consiste à souffler dans un tuyau avec le nez pincé. Il faut une bonne coopération du patient, pas toujours évidente chez les petits enfants et les personnes âgées. La spirométrie permet la mesure des volumes pulmonaires et des débits lors d’une inspiration et expiration forcée.
L’exploration fonctionnelle respiratoire
Les principaux paramètres étudiés sont :
• la capacité vitale (CV) : volume maximum d’air mobilisable lors d’une inspiration et expiration forcée ;
• le Vems : volume expiratoire maximal en une seconde ;
• le rapport Vems/CV.
La pléthysmographie corporelle permet de mesurer la totalité du volume d’air contenu dans les poumons (CPT), le volume résiduel (VR) : volume restant dans les poumons après une expiration forcée, et la résistance des bronches à l’écoulement de l’air. De plus, on appréciera l’action des médicaments.
A l’issue de cet examen, on distinguera la bronchite chronique simple où il n’existe pas d’obstruction bronchique, la bronchite chronique avec obstruction mise en évidence par une baisse du Vems et du rapport VEM/CV, ainsi qu’une augmentation des résistances : degré d’emphysème avec augmentation de la CPT et du VR. Dans tous les cas, un test de réversibilité sera pratiqué pour apprécier la réponse aux différents traitements B2 mimétiques, anticholinergiques, ou une association des deux. A l’issue de l’exploration fonctionnelle respiratoire, on classera le niveau de gravité de la bronchite en fonction des mesures du Vems.
La bronchite chronique en trois stades de gravité croissante
- Modérée (Vems comprit entre 50 et 80 % de la normale).
- Modérée à sévère (Vems compris entre 35 et 50 % de la normale).
- Sévère (Vems inférieure à 35 % de la normale).
La gazométrie (mesure des gaz du sang par prise de sang au niveau de l’artère radiale et au niveau du poignet), permet de connaître la teneur en oxygène et en gaz carbonique du sang artériel, reflet du bon fonctionnement des poumons. En cas de baisse d’oxygène inférieure à 55 mm, il existe une indication d’oxygénothérapie nocturne. A part l’épreuve d’effort cardio-respiratoire qui permet, grâce à la mesure de la VO2 (quantité d’oxygène au maximum de l’effort et lors du seuil ventilatoire), de programmer la rééducation respiratoire. De plus, elle appréciera l’état cardiaque et musculaire. Le test de marche de six minutes (distance parcourue au bout de six minutes d’un effort soutenu), permet d’apprécier les capacités à l’effort du sujet.
Le bilan radiologique
Il consiste en une radiographie des poumons qui peut être normale, ou montrer des signes d’inflammation des bronches et une destruction du poumon correspondant à de l’emphysème (augmentation de calibre des artères pulmonaires), traduisant une hypertension artérielle pulmonaire. Parfois, elle montrera une image anormale, et la recherche d’un cancer bronchique devra être effectuée par fibroscopie bronchique et scanner thoracique.
Une radiographie des sinus permettant la recherche de foyers infectieux à l’origine de surinfections bronchiques.
Un bilan cardiaque avec électrocardiogramme, échographie cardiaque permet d’apprécier le retentissement de la bronchite chronique sur le cœur (dilatation des cavités cardiaques droites, degré d’hypertension artérielle pulmonaire).
Bronchite chronique : Evolution de la maladie
La bronchite chronique, au fil de son évolution, va créer une obstruction mécanique des petites bronches puis, à un stade plus tardif, une obstruction complète des bronchioles avec distension et destruction des alvéoles pulmonaires (emphysème centro-lobulaire).
On distingue trois catégories de bronches qui ont un calibre décroissant : les grosses bronches, les petites bronches et les bronchioles qui ventilent les alvéoles, petites unités pulmonaires. Schématiquement, au stade de la bronchite chronique simple, le tabac et les autres irritants vont entraîner une hypertrophie des glandes muqueuses (glandes situées au niveau de la paroi bronchique) avec une hypersécrétion (toux et expectoration chronique). Puis, au fil de l’évolution, et favorisée par les infections, il y aura atteinte des petites bronches et création d’une obstruction bronchique. Plus tard, ce seront les bronchioles, dont l’obstruction entraîne une distension et une destruction des alvéoles, qui seront touchées. On parle d’emphysème centro-lobulaire avec atteinte de l’oxygénation (baisse de la pression en oxygène dans le sang artériel et augmentation du gaz carbonique) quand il existe un trouble entre la ventilation et la perfusion. Autrement dit, les alvéoles sont perfusées mais non-ventilées.
Evolution de la maladie
Dans 10 à 20 % des cas, la bronchite chronique évolue vers le stade obstructif et peut ensuite évoluer vers l’insuffisance respiratoire avec retentissement sur les cavités cardiaques droites. Tout au long de sa vie, le bronchiteux chronique présentera des poussées aggravant sa maladie à l’occasion de surinfections, bronchiques le plus souvent. Au début de la maladie, ces poussées sont peu invalidantes. Par la suite, elles entraîneront une gêne respiratoire importante et au stade de l’insuffisance respiratoire, pourront être à l’origine de décompensations sévères avec des séjours en réanimation et risque vital.
Les complications de la bronchite chronique, outre l’obstruction (baisse du volume expiratoire maximum seconde : Vems) et l’insuffisance respiratoire quand l’oxygénation de l’organisme n’est pas assurée (pression partielle en oxygène du sang artériel inférieur à 55 mm de mercure, augmentation de la pression partielle en gaz carbonique), sont :
- Le retentissement cardiaque droit, avec insuffisance cardiaque droite (cliniquement, les jambes sont enflées)
- L’embolie pulmonaire (obstruction par un caillot sanguin des artères pulmonaires).
- Le pneumothorax (présence d’air entre la paroi et le poumon comprimant celui-ci).
- Les complications liées aux bulles d’emphysème : pneumothorax, pneumo médiastin (air dans la partie médiane du thorax) lors d’une rupture de celle-ci.
Bronchite chronique : Quels facteurs aggravants ?
La correction des facteurs de risque fait partie intégrante du traitement de la bronchite chronique.
Le principal facteur aggravant reste le tabagisme. L’importance de la consommation tabagique est directement liée à la fréquence, la dégradation de la fonction respiratoire, la mortalité de la maladie. En effet, chez le sujet non-fumeur, le Vems (volume expiratoire maximum seconde) décroît naturellement de 8 à 20 millilitres par an. Il diminue chez le fumeur actif de 60 millilitres par an, et en cas de bronchite chronique obstructive, il décroît de 60 à 90 millilitres par an. Le déclin est d’autant plus rapide que l’obstruction est importante. Il faut tenir compte de la prédisposition génétique. En effet, nous sommes inégaux devant l’action néfaste du tabac. Le tabagisme et l’exposition professionnelle ont aussi un effet cumulatif.
Les risques au quotidien
L’activité professionnelle expose à certains risques, notamment aux minéraux (dans le cas des mineurs, des ouvriers de fonderie), au chlore, au dioxyde de soufre, aux isocyanates. le rôle exact de la pollution atmosphérique est discuté, mais les pics de pollution favoriseraient les poussées d’exacerbation de la maladie. Les mauvaises conditions climatiques (froid, humidité, brouillard). Enfin, les infections respiratoires de l’enfance, sont un facteur favorisant ou déclenchant, alors que les infections respiratoires à l’âge adulte jouent également leur rôle.
Bronchite chronique : Comment vivre avec ?
Une bonne hygiène de vie permet avec le traitement, de mieux accepter sa maladie.
L’arrêt du tabagisme va permettre une diminution des épisodes d’exacerbation. L’arrêt de l’alcool est également un élément important. La réduction d’un surpoids et le maintien d’une activité physique (une heure de marche par jour) améliorent la qualité de vie avec une diminution de la sensation d’essoufflement. Il est nécessaire de boire un litre et demi d’eau par jour pour favoriser la fluidité des sécrétions et leur évacuation.
Bronchite chronique : Traitement
Le traitement de la bronchite chronique a deux objectifs : améliorer la gêne quotidienne et prévenir la dégradation de la fonction respiratoire d’une part ; traiter les épisodes d’exacerbation le plus précocement possible d’autre part.
On distingue le traitement de la bronchite chronique en état stable, et en cas de poussée aiguë.
L’état stable
Le traitement est surtout préventif. Il s’agit surtout de l’arrêt du tabagisme et de la prévention de la survenue des exacerbations (vaccination antigrippale, vaccination antipneumococcique, immunostimulants, traitement de foyers infectieux au niveau du nez et des sinus (rhino-sinusiens) ou de la bouche (stomatologiques)). Il faut une préparation rigoureuse en cas d’intervention chirurgicale (chirurgie thoracique, abdominale, sus-ombilicale) par l’arrêt du tabac, l’utilisation de broncho-dilatateurs, kinésithérapie respiratoire de drainage.
Il n’existe pas de traitement curatif de la bronchite chronique, le traitement n’est que symptomatique :
- L’utilisation de broncho-dilatateurs en aérosols doseurs ou sous forme de poudre inhalée (B2 mimétique), anticholinergiques, ou une association des deux ne se conçoit qu’après s’être assuré, lors des épreuves fonctionnelles respiratoires, que la maladie est réversible. Mais même quand il n’y a pas d’amélioration fonctionnelle, mais s’il existe une amélioration symptomatique, leur prescription est justifiée.
- La corticothérapie orale n’est pas justifiée en état stable. La corticothérapie inhalée sous forme d’aérosol ou de poudre a ses indications.
Sont à proscrire : les antitussifs, les sédatifs et hypnotiques, les bêta-bloquants (médicaments cardiaques qui favorisent l’obstruction bronchique).
La prise en charge multiple, psychologique, reprise de l’entraînement à l’effort, kinésithérapie de drainage et apport alimentaire pour lutter contre la dénutrition, peuvent améliorer les possibilités d’exercice et améliorer la qualité de vie. Elle est souvent faite dans des centres de rééducation et de réhabilitation respiratoire.
L’insuffisance respiratoire
Au stade de l’insuffisance respiratoire, l’oxygénothérapie de longue durée à domicile va améliorer la survie. Elle est indiquée en cas de pression partielle en oxygène du sang artériel, mesurée par les gaz du sang, inférieure à 55 mm de mercure. Elle se fera à l’aide d’oxygène gazeux par bouteilles, d’extracteur qui concentre l’oxygène ambiant mais qui nécessite une alimentation électrique, d’oxygène liquide sous forme de grandes cuves. Le débit utilisé est le plus souvent d’un à deux litres par minute et sera apporté la nuit. L’oxygène est respiré par le malade grâce à un tuyau souple et des lunettes nasales. Dans la journée, le patient pourra être sans oxygène et dans certains cas, avoir une petite bouteille pour se déplacer. Parfois, surtout après un épisode de décompensation, une ventilation assistée est utile. On distingue la ventilation non invasive, qui consiste à relier un respirateur (machine remplaçant les poumons défaillant) avec ou sans apport d’oxygène, au patient, par l’intermédiaire d’un tuyau et d’un masque nasal ou facial. Dans d’autres cas il y aura nécessité d’une prothèse de trachéotomie (orifice créé à la face antérieure du cou sous la glotte), c’est la ventilation invasive.
En cas de poussée aiguë
Cette poussée est favorisée le plus souvent par une surinfection bronchique. Le traitement consiste dans les broncho-dilatateurs inhalés, la kinésithérapie de drainage, une antibiothérapie associée ou non a une corticothérapie. Dans les formes sévères, l’hospitalisation est indispensable avec parfois séjour en réanimation, ou une ventilation non invasive ou invasive (qui ne pourra pas toujours être évitée). La ventilation non invasive permet à ces malades de passer le cap aigu et de retrouver leur état antérieur, alors qu’en cas de ventilation invasive, le risque de rendre le patient dépendant de la machine est réel.