Près de 300 000 personnes en France souffrent de polyarthrite rhumatoïde. Elle touche 3 fois plus les femmes que les hommes. La polyarthrite rhumatoïde est un rhumatisme inflammatoire chronique, de mécanisme auto-immun. Touchant principalement la femme vers 45 ans, elle nécessite une prise en charge précoce en raison de l’invalidité qu’elle entraîne.
Les mécanismes à l’origine de la maladie
La polyarthrite rhumatoïde est une maladie auto-immune, due à plusieurs facteurs.
Il existe une prédisposition génétique, associée à la présence de l’antigène HLA DRB1. Les sujets possédant un allèle (portion de gène) de susceptibilité à la polyarthrite rhumatoïde ont 3 fois plus de risque de développer la maladie. Le risque est multiplié par 15 à 20 chez les sujets possédant 2 allèles de prédisposition.
L’agent déclencheur de la maladie reste à ce jour inconnu. On sait seulement qu’il existe un mécanisme de toxicité impliquant les lymphocytes CD4.
Il existe une prolifération synoviale, avec formation d’un pannus synovial, induite par la production de facteurs de croissance cellulaire et de facteurs d’angiogenèse.
Ceux-ci sont également à l’origine de la synovite rhumatoïde, qui joue un rôle essentiel dans la survenue de lésions articulaires. Les lymphocytes B sont stimulés, et produisent des auto-anticorps, qui pourront être dosés, permettant le diagnostic de la maladie.
Des processus inflammatoires aboutissent à la stimulation des cellules des tissus articulaires et osseux, favorisant ainsi la destruction cartilagineuse et osseuse.
Le diagnostic de polyarthrite rhumatoïde
L’existence de douleurs d’aspect inflammatoire permet de poser le diagnostic d’arthrite : il s’agit de douleurs nocturnes, qui réveillent la patiente. Le matin, une raideur articulaire est décrite, empêchant une bonne utilisation des articulations.
Ces arthrites se situent au niveau des articulations des mains et des poignets, mais également des avant-pieds, genoux, coudes ou épaules. L’atteinte articulaire est bilatérale et symétrique.
Chez une femme âgée de 40-50 ans, l’arthrite siégeant au niveau de ces articulations évoque le diagnostic de polyarthrite rhumatoïde.
Un examen rhumatologique est alors nécessaire, qui retrouve :
- des articulations au niveau des mains chaudes, douloureuses, d’amplitude diminuée
- présentant une tuméfaction : le pannus synovial
- un aspect fusiforme des doigts
- un empâtement du poignet
- une ténosynovite des tendons extenseurs et fléchisseurs des doigts
- une tuméfaction des genoux, avec ou sans épanchement articulaire
- des articulations des pieds épaissies
Des nodules rhumatoïdes peuvent être retrouvés au niveau des faces d’extension des bras, des jambes et des doigts : ils sont fermes, indolores et mobiles.
Il existe parfois des adénopathies, et l’existence d’une sécheresse oculaire et/ou buccale fait suspecter une maladie auto-immune systémique (syndrome de Goujerot-Sjögren).
Lorsque 4 des critères suivants (définis par l’Association Américaine de Rhumatologie) sont présents, on peut poser le diagnostic de polyarthrite rhumatoïde :
- raideur articulaire matinale de plus d’une heure, depuis plus de 6 semaines
- atteinte d’au moins 3 articulations différentes, depuis au moins 6 semaines
- arthrite des articulations des mains et des poignets depuis plus de 6 semaines
- atteinte symétrique
- présence de nodules rhumatoïdes
- facteur rhumatoïde positif
- présence de signes radiologiques au niveau des mains et des poignets
Ces signes peuvent n’être présents que tardivement, ce qui est susceptible de retarder le diagnostic.
Les examens complémentaires
Des radiographies des mains et des poignets sont réalisées, ainsi que pour les autres articulations douloureuses (genoux, épaules, avant-pieds).
Elles sont souvent normales au début de la maladie, et montrent par la suite des signes d’arthrite débutante : déminéralisation en bande des épiphyses, érosions osseuses…
Les examens biologiques permettent souvent de retrouver un syndrome inflammatoire. Le dosage des anticorps est positif dès le début de la maladie. Le facteur rhumatoïde quant à lui est négatif au début de la maladie : on le recherche par le test au latex ou la réaction de Waaler-Rose. Il se positive dans les suites de l’évolution de la maladie mais reste négatif dans 20% des cas. D’autres auto-anticorps peuvent être recherchés par les spécialistes. L’examen du liquide articulaire montre une inflammation, mais apporte peu d’éléments permettant le diagnostic. Une biopsie synoviale peut être réalisée à la recherche du pannus synovial (hypertrophie des franges de la synovie).
Le suivi de la polyarthrite rhumatoïde et son évolution
Une fois le diagnostic posé à l’aide des symptômes et des examens complémentaires, la surveillance clinique est effectuée tous les 3 mois : elle évalue la douleur, l’inflammation, la qualité de vie. L’efficacité des traitements peut ainsi être appréciée.
La surveillance biologique est également effectuée à un rythme trimestriel : réalisation d’une Numération Formule Sanguine, dosage de la CRP et mesure de la Vitesse de Sédimentation (marqueurs de l’inflammation). La surveillance radiologique est annuelle, et le médecin veillera également à surveiller la tolérance des traitements.
La maladie évolue pendant de nombreuses années au rythme de poussées entrecoupées de rémissions. Une rémission spontanée peut être possible (grossesse) ou sous traitement, avec toujours un risque de reprise évolutive. Dans 5 à 20% des cas, la polyarthrite rhumatoïde guérit. Mais dans la plupart des cas, elle persiste et s’aggrave, aboutissant à un tableau de polyarthrite chronique déformante, destructrice et ankylosante au niveau des mains, des pieds et des genoux surtout. Généralement après 10 ans d’évolution, la polyarthrite rhumatoïde finit par s’éteindre, en laissant des séquelles limitées.
Une atteinte rénale secondaire est également possible.
La prise en charge de la maladie et ses traitements
La prise en charge de la polyarthrite rhumatoïde associe un traitement à des symptômes, visant à soulager les douleurs, et un traitement de fond pour ralentir ou prévenir les érosions osseuses et destructions articulaires. Des traitements locaux médicaux ou chirurgicaux peuvent être associés.
Le traitement symptomatique repose sur la prescription :
- de repos lors des poussées : arrêt de travail
- d’un traitement par anti-inflammatoire non stéroïdien
- d’une corticothérapie par voie générale
- d’un traitement antalgique
- d’un traitement local par infiltration intra-articulaire d’un corticoïde ou synoviorthèse en cas d’articulation restant inflammatoire
Le traitement de fond dépend du stade de la maladie et peut utiliser :
- les anti-paludéens de synthèse
- le méthotrexate (immunosuppresseur)
- le léflunomide
- la sulfasalazine
- les anti-TNF (anticorps monoclonaux) dans les formes sévères
A cela sont associés des traitements physiques, utiles à tous les stades de la maladie :
- rééducation fonctionnelle
- orthèse de repos ou de fonction
- l’ergothérapie
La chirurgie préventive peut être utile, de même que la chirurgie réparatrice ou palliative.
Fréquente chez les femmes après 40 ans, la polyarthrite rhumatoïde n’en reste pas moins une pathologie invalidante, qui entre dans le cadre des affections prises en charge à 100% par la sécurité sociale. Elle nécessite un traitement lourd et un suivi régulier, facilité par la tenue d’un carnet de surveillance du polyarthritique.